` Anne-lise RIAS
Atelier désenchantier !

Mettre en pratique la redirection écologique

Le concept de redirection écologique est de plus en plus exploré par les sciences de gestion, en sciences économiques, et d'autres champs de Recherche. Ces travaux scientifiques distinguent transition écologique et redirection écologique en précisant que cette dernière vise à réaligner les organisations publiques et privées sur les limites planétaires.
A quelques exceptions près, les entreprises d'intérêts privés sont encore peu influencées par ces travaux. Peut-être parce que la redirection entre en contradiction directe avec ces intérêts et ébranle les stratégies établies, y compris dans les entreprises qui les ont "actualisées" pour faire une transition écologique. Peut-être parce que le vocabulaire de la redirection écologique (arbitrages, renoncement, clôture de projets, refus de faire advenir, démantèlement) heurte l'imaginaire couramment associé à l'innovation et au développement des activités économiques. Peut-être parce que les entreprises y sont encore peu souvent incitées.

L'atelier Désenchantier ! sensibilise les professionnel·les, pour rendre la redirection écologique envisageable d'abord, puis opérationnelle. J'ai mené cet atelier auprès de la communauté de la Méthode Lance, qui réunit des consultant·es en transformation, pour les encourager à inclure la redirection comme un axe dans les stratégies d'entreprises et comme un préalable qui doit questionner leurs modèles de développement, voire l'existence même de leurs activités.

En introduction, le cas -fictif- de l'entreprise Gaston leur est présenté. Ce support décrit sa structure : cadre légal dans lequel elle agit, infrastructures indispensables à son activité, produits et services qu'elle vend, son modèle économique, etc. Ces éléments de contexte indiquent qu'une redirection de cette entreprise est à planifier.
A l'étape suivante, les participant·es à l'atelier proposent une démarche de redirection que l'entreprise Gaston pourrait opérer. Choisissant l'angle de l'Offre d'une part et celui du Client, deux sous-groupes ont ici échangé sur ce à quoi l'entreprise devrait renoncer, ce qu'elle pourrait diminuer, les infrastructures qui devraient être désaffectées, et à quoi les moyens de Gaston pourraient être réalloués. Dans le même temps les groupes ont identifié les parties prenantes qui seraient concernées par la redirection proposée, qu'elles soient humaines ou symboliques, d'intérêt privé ou public, c'est-à-dire avec qui la démarche devrait être menée et à quels intérêts elle pourrait se heurter.
En dernière étape, il s'agit de raconter la redirection proposée : par quelles étapes l'entreprise est passée, quels leviers ont été utilisés, quels nouveaux métiers -plus ou moins fictifs- comme le démêleur de contrat, ou le notaire patrimonial ont été mobilisés, sur quelle(s) limite(s) l'entreprise s'est ainsi réalignée.

Cet atelier a fait apparaître plusieurs difficultés dont :
-celle de faire des arbitrages à la hauteur des enjeux, la grande majorité des groupes a défendu une poursuite de l'activité Gaston avec des changements mineurs (nouvelle clientèle, réorientation du service, ...)
-celle de s'autoriser à simplement penser en dehors des stratégies habituelles de développement d'entreprises. Par exemple : personne n'a choisi de cesser complètement toutes les activités de Gaston ; aucun groupe n'a proposé de faire arbitrer par une entité tierce (par exemple un jury citoyen) la poursuite ou la clôture d'activités ; la possibilité de faire de Gaston le témoin d'un modèle économique passé, qu'on pourrait placer dans un "musée", n'a pas été proposée.

En conclusion, le groupe a comparé les différences et points communs entre une démarche de redirection écologique et la méthode d'adaptation transformationnelle "Méthode Lance" portée par ce collectif professionnel.

Atelier et outils mis en pratique pour des groupes de 12 personnes sur 3 heures.

Création et conception : Anne-lise Rias